«Fichez-leur la paix!» Voilà le message qu’envoie le comité Nobel aux autocrates en couronnant de son prestigieux prix deux journalistes, le Russe Dmitri Mouratov et la Philippine Maria Ressa. À leur place, cela aurait pu être un Afghan ou une Biélorusse, une Chinoise ou un Turc. Bien sûr, ces deux professionnels de l’information n’ont pas vraiment contribué à la paix dans le monde. Mais, c’est certain, les dirigeants de leurs pays sont décidés à leur faire la guerre.
Dmitri Mouratov est le directeur du journal «Novaïa Gazeta», dont six reporters ont été assassinés en vingt ans. Ce Prix Nobel lui est décerné au lendemain même du quinzième anniversaire du meurtre de la plus célèbre de ses reporters, Anna Politkovskaïa, et de l’anniversaire du président russe. Depuis que Vladimir Poutine est au Kremlin, 40 journalistes ont été tués et toutes les enquêtes piétinent quand il s’agit d’identifier les commanditaires.
Maria Ressa est la fondatrice du site d’information en ligne «Rappler», un des rares contrepouvoirs à la violente présidence de Rodrigo Duterte. Il a déclaré une «guerre totale» aux médias qui n’appartiennent pas à ses amis. En deux ans, Maria Ressa a cumulé dix mandats d’arrêt et risque une centaine d’années de prison.
Leur seul tort à tous deux est d’exercer avec courage leur métier, celui de «porter la plume dans la plaie», d’user de la première des libertés, la liberté d’expression, sans qui la démocratie n’existe pas. Pour les faire taire, tout est bon: fausses accusations, intimidations, menaces, emprisonnement, jusqu’à l’élimination physique.
À travers eux, c’est toute une profession qui est distinguée, alors que les conditions pour l’exercer en toute indépendance se dégradent un peu plus dans nombre de pays du monde.
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L’éditorial – Un Nobel pour le journalisme
Le Russe Dmitri Mouratov et la Philippine Maria Ressa ont reçu le prix Nobel de la paix. Une façon de célébrer leur combat pour la liberté de la presse.