Un panneau humoristique tourne à l'affaire d'Etat
Une caricature installée sur la frontière linguistique, entre le Jura et Soleure, sème la discorde. Son retrait est envisagé. Une pétition s'y oppose.

«On peut rire de tout mais pas avec tout le monde». La citation de Pierre Desproges est si souvent utilisée qu'elle en devient usée. Et pourtant, c'est bien elle qui surgit à nouveau en découvrant cette rocambolesque histoire jurassienne, dont le héros est un panneau touristique, dont le seul tort est d'avoir voulu être drôle.
L'objet de la discorde trône au Welschgätterli, à la frontière cantonale entre le Jura et Soleure. Le dessin représente d'un côté un soleil radieux qui règne sur le dernier-né des cantons suisses et de l'autre un épais brouillard qui s'empare du «reste du monde». Avec cette inscription: sommet du Röstigraben.
L'initiative est celle de Jura Tourisme et Jura Trois-Lacs. Les deux organisations ont fait appel au dessinateur Pitch pour illustrer six lieux-dits du Jura. Cela fait presque trois ans que les panneaux ont été installés, et ils n'avaient jusqu'ici jamais fait parler d'eux. C'était compter sans la sensibilité d'un élu UDC.
Un caractère «offensant»
Didier Spiess, c'est son nom, estime que le dessin déplaît en raison de son caractère «offensant». Plusieurs habitués des lieux se seraient plaints. Le 22 novembre, ce député a même interpellé le gouvernement jurassien, questionnant l'intérêt de cette «rivalité malsaine».
L'affaire aurait pu en rester là, si le ministre en charge du dossier n'avait promis d'intervenir. «Nous ne souscrivons pas à ce message. Ce n'est pas une façon de faire la promotion de notre canton ni de notre état d'esprit», a précisé Jacques Gerber. Selon la radio RFJ, langue sera prise avec les institutions concernées afin de «faire modifier ou supprimer» l'inscription.
Le troisième acte de cette pièce tragicomique s'est joué samedi. Une pétition a été lancée sur les réseaux sociaux par le média satirique La Torche 2.0, auquel collabore le dessinateur. S'élevant contre une censure et critiquant un manque d'humour, le texte exige que le panneau ne soit ni modifié ni enlevé. Il recueillait déjà plus d'un millier de signatures ce mardi.

«Je suis surpris par l'ampleur que prend toute cette affaire, mais je trouve rassurant que les gens aient plus d'humour que nos autorités», glisse Pitch. Et le caricaturiste à l'origine de «l'outrage» de s'étonner que ce soit ce dessin qui pose problème. «J'en ai fait des tellement pires!» Sa réaction s'est faite aussi par dessin interposé, publié lui aussi dans La Torche 2.0. Dans une nouvelle caricature, il s'amuse de «l'Humourgraben» qui sépare le ministre PLR et le député UDC du «reste du monde». Didier Spiess, lui, ne regrette en rien son intervention. «Je ne manque pas d'humour et suis content d'avoir lancé le débat sur l'intérêt de placer ce genre d'affiche. D'ailleurs, les budgets octroyés aux organisations touristiques doivent être rediscutés bientôt.» Faut-il voir une menace dans ces propos? «Absolument pas, mais cette affaire soulève des questions.»
La balle est désormais dans le camp des autorités. On retiendra encore, pour la petite histoire, que selon plusieurs sources, le terme Welschgätterli signifierait la petite porte vers le pays romand. Une petite porte dont on se demande encore si elle vaut vraiment une aussi grande polémique.
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