Un plaidoyer pour des archives citoyennes, mémoire du canton
Une exposition met à l'honneur les fonds privés confiés aux Archives cantonales vaudoises

Les Archives cantonales, une des premières conquêtes de l'indépendance vaudoise, ont été fondées en 1798 afin de conserver la mémoire des nouvelles autorités, affirmant du même coup leur souveraineté après le départ des baillis. Une mission de dépôt central des autorités exécutives, législatives et judiciaires qu'elles ont conservée au fil du temps, en la complétant d'autres activités. Institution publique, les Archives cantonales vaudoises (ACV) se veulent une passerelle entre l'administration et le citoyen, le patrimoine et la recherche historique.
C'est ainsi que depuis plus de vingt ans, les ACV collectent également la mémoire des citoyens, des entreprises ou des associations à travers leurs fonds privés. «Ce sont des composantes de l'histoire cantonale, relève Gilbert Coutaz, directeur des ACV pour quelques semaines encore. L'histoire officielle ne couvre pas tous les domaines de la mémoire. La vie associative, partisane ou industrielle offre sur notre passé des points de vue différents, et parfois en conflit.»
Dans le hall d'entrée du bâtiment des ACV, sis à Chavannes, une exposition présente brièvement une quarantaine de ces fonds – choisis parmi les 2092 précieusement conservés. Qu'y trouve-t-on? Des parcours personnels exceptionnels, qui ont marqué leurs temps, comme celui du poète et chansonnier Jean Villard-Gilles, du médecin Auguste Rollier, le pionner de l'héliothérapie, ou de l'homme de radio Émile Gardaz. «Concernant Gilles, nous disposons du fonds de référence, avec aussi bien les manuscrits de ses chansons que son courrier, des partitions, des disques et des bandes magnétiques. Sans oublier la graal, le manuscrit de «La Venoge», son texte emblématique.»
Deuxième catégorie, les familles ancrées dans l'histoire depuis des siècles, comme les Rochat, installées à L'Abbaye depuis 1480, les de Blonay, dont l'histoire remonte au XIe siècle, ou les Couvreu de Deckersberg, originaires des Flandres mais installés à Vevey depuis 1685, et dont le fonds, qui contient également la mémoire de Gustave Doret, occupe près de 100 mètres d'étagères!
D'autres familles, de noble origine ou non, ont déposé leurs archives à Chavannes. Ainsi des Mercier, la discrète famille des tanneurs qui ont façonné Lausanne, ou les Bugnion, qui ont donné à la capitale des générations de conseillers et magistrats. «On peut parler d'une sorte de Panthéon, remarque Gilbert Coutaz. L'entrée de ces fonds chez nous leur donne de la valeur. «Nous faisons partie de la mémoire du Canton», peuvent se dire les familles, et pas seulement celles à particule, qui nous remettent ces documents.» Sauvées parfois de la benne à ordure à la toute dernière minute, d'autres archives sont également à la disposition du public et des chercheurs: celles d'entreprises qui, comme Paillard-Hermès Precisa, les Ateliers mécaniques de Vevey ou les Câbleries de Cossonay, ont autrefois été des fleurons économiques du canton. «En août dernier, nous avons sauvé les archives du Comptoir», se réjouit l'archiviste en chef.
Des missionnaires aux gymnastes
Initiatives citoyennes, missionnaires de l'Église libre vaudoise, franc-maçonnerie ou association de gymnastique, Fondation pour le Réarmement moral ou Terre des hommes, l'inventaire des thèmes raconte à lui seul l'éventail des activités parfois passées, parfois d'actualité, qui ont animé et animent encore les Vaudois. «Il ne faut pas oublier que nous sommes installés sur un site universitaire, commente Gilbert Coutaz. Cette proximité avec la recherche fondamentale exerce une certaine influence sur notre politique d'acquisition.»
Mais comment ces fonds arrivent-ils dans les dépôts climatisés de Chavannes? Il suffit de contacter les Archives cantonales, qui prennent ensuite leurs dispositions pour examiner la matière. Parfois, ce sont des antiquaires qui signalent des documents, parfois des privés qui repèrent un ensemble, comme l'a fait en 2017 un archéologue parisien, tombé par hasard sur le travail d'un généalogiste vaudois dans le débarras d'une cave proche de chez lui. Dix classeurs et trois boîtes d'archives qui sont venus enrichir de documents exceptionnels, par miracle, un fonds familial déjà déposé dans la banlieue lausannoise.
«Nous avons très souvent des appels, se félicite Gilbert Coutaz. Bien sûr, on ne peut pas tout sauver, et puis nous ne sommes pas la seule institution. Nous sommes des généralistes, d'autres se concentrent sur des thématiques, comme la construction, le cinéma ou la littérature.»
Reste qu'en 2019, au 11 avril, les ACV ont déjà enregistré l'arrivée de 20 fonds d'origine privée, et de 10 d'archives officielles. Amateurs ou professionnels, les historiens qui hantent les salles des ACV ont encore du boulot.
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