Création pour chœur et orchestreUn puissant poème vocal de mort et de résurrection
«La Passion» de Théo Schmitt et Stéphane Blok a fait cathédrale pleine à Lausanne vendredi 22 avril. Retour sur une œuvre inclassable et saisissante.

«La mort se rêve tel un poème / Et se vit comme un tourment», écrit Stéphane Blok dans le livret de «La Passion – Amours infinies infinies amours» mis en musique par Théo Schmitt. La création de cette «Passion» à la cathédrale de Lausanne vendredi 22 avril par la Micro-Harmonie de Stéphane Pecorini et un chœur féminin s’est révélée à juste titre comme un retentissant poème sur la mort et la résurrection, et a été vécue par le public comme un formidable tourment d’émotions contrastées.
Deux destins de femmes
Insolite et audacieuse, cette «Passion» l’est d’abord par son point de vue, qui met en scène la tragédie d’une mise à mort au-delà de son aspect biblique, relatée par Marie, mère de Jésus, et Marie-Madeleine, son amante. En ce sens, on serait plus proche d’un «Stabat Mater» (le texte latin est d’ailleurs chanté par le chœur) et d’un «Stabat Sponsa» pour clamer la douleur tout aussi vive de l’épouse. Flavia Aguet et Carole Meyer ont incarné ces femmes meurtries avec un engagement de chaque note, sur une partition qui ne les ménageait pas. Seul regret: certaines paroles chantées simultanément par les deux solistes nuisaient à la perception des mots.
«Parle à la mort / Qui ne répond jamais»
L’œuvre surprend aussi par son effectif pour vaste ensemble d’harmonie enrichi de cordes (violoncelles, contrebasse, harpe) et percussions. La sonorité globale ressemblait parfois davantage à un orgue qu’à un orchestre symphonique. Théo Schmitt se révèle un orchestrateur hors pair, maîtrisant tous les dégradés de cette masse vibrante et bruissante avec un goût pour les crescendos les plus puissants. Et la légèreté du mystère.
Grand amateur de musiques de films dont il joue de tous les codes, le compositeur vaudois se distingue ici par un langage plus âpre et dense que dans ses précédentes partitions. Il fascine par des effets de spatialisation qui n’ont rien de gratuit, nécessitant l’intervention de deux chefs d’orchestre: lorsque le chœur féminin, réuni et dirigé par Caroline Meyer, se répartit le long des bas-côtés pour embrasser le public de la nef, son injonction «Parle à la mort!» rebondit sur tous les piliers!
Le Sentier, temple, sa 30 (20h)
St-Maurice, basilique, di 1er mai (15h)
Rens.: monbillet.ch
www.lapassion2022.ch
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