Un tribunal s'en va sur l'alpage pour juger l'impact des éoliennes
La Cour visitait jeudi la crête destinée à accueillir les éoliennes de Vallorbe. Le verdict sera crucial pour les futurs projets.

«Pour la visite, je précise qu'il est autorisé de laisser tomber la veste.» Sourire en coin et regard affûté, la présidente de la Cour du Tribunal cantonal menait jeudi une sortie dans les alpages de Sur Grati. Sous un ciel lourd, par une vingtaine de degrés et dans une file indienne complétée par une quarantaine d'opposants, de spécialistes et de participants divers, le tout dans des pâtures jaunes de pissenlits.
L'objet de tout ce ramdam à l'alpage? Les recours au projet éolien Sur Grati, porté par les communes de Vallorbe, de Vaulion et de Premier. Le but? Examiner in situ l'impact paysager des futures éoliennes vaudoises. Car outre les six hélices de Grati, l'enjeu des parties est évidemment d'obtenir une jurisprudence favorable pour les futurs parcs vaudois lors de leur probable passage en justice.
Le premier et dernier parc à être examiné, celui de Sainte-Croix, en 2014, avait été recalé de la question: il touchait un territoire déjà industrialisé et modifié par des lignes électriques. Pour les autres projets, ce ne sera plus le cas. Sur Grati, les opposants ont d'ailleurs insisté sur la virginité immaculée de ce recoin du canton de Vaud: la vue depuis le Mont-d'Or, l'effet sur les environs et sur le sol même: «Les chemins seront bétonnés et élargis pour les travaux», interpelle Roman Hapka, responsable romand de la Fondation suisse pour la protection du paysage (FP). «Pas partout, et c'est temporaire, rétorque le syndic de Vallorbe, Stéphane Costantini. Sitôt les mâts installés, ce sera remis en chemin d'alpage.»
Parc régional et lumières
Autre pique, l'effet sur le parc régional du Jura vaudois, sur sa charte et sur ses subventions. «C'est incompatible avec des éoliennes», soufflent les opposants. «Au contraire, le parc est pour le renouvelable», lâche un membre du comité du parc. «Et les communes peuvent en sortir quand elles veulent», ajoutent les élus locaux. «Et de nuit? N'oubliez pas que ça va clignoter de partout», chargent les opposants. «La Confédération évalue encore la question», nuance la défense.
L'idée des opposants est de faire considérer l'impact cumulé, voire d'obtenir une suspension de la procédure le temps que les trois parcs du périmètre parviennent en justice. «Regardez là, il y aura Bel Coster, on voit le mât de mesure. Ici en face, les douze éoliennes du Mollendruz. En tout, ça en fera 27 dans la région», tonne Pierre Chiffelle, défendant entre autres la Fondation suisse pour le paysage. «On parle de Sur Grati ici», recadre régulièrement le syndic de Vallorbe, Stéphane Costantini.
Bref. En chaussures de marche et en veston dans l'herbe grasse, les coups ont fusé. Et pas pour rien. C'est que le débat ne touche pas un terrain vierge. Depuis plusieurs années, bureaux spécialisés et fonctionnaires ont tenté de mettre en place des outils d'évaluation de l'impact paysager de l'éolien.
Regard objectif
«Dans la sélection des parcs, on a considéré un ensemble de critères paysagers, détaille François Schaller, ingénieur à la Direction générale de l'environnement, à l'ombre d'un sapin. Il faut voir la valeur du paysage dans lequel les éoliennes s'insèrent. Est-il unique ou reproductible? Les mâts vont-ils suivre l'ondulation naturelle des crêtes? Des points emblématiques seront-ils touchés?»
On pense notamment aux points de vue touristiques, ou à Romainmôtier et Vaulion, classés pour leur patrimoine bâti. Là, les spécialistes ont recours aux bases de la géométrie. «On fait un rapport entre une éolienne et un édifice, comme un clocher, depuis un point de vue voisin. Il faut ensuite comparer la taille des deux éléments, au même niveau, sans perte de netteté. Ça permet de définir objectivement leur place dans un regard, résume Aline Guillaume-Gentil, ingénieure impliquée dans l'étude d'impact de Sur Grati. Après, le reste rentre dans le domaine du subjectif.»
Et surtout dans la délicate pesée d'intérêts des juges, qui devront se prononcer sur le coût visuel de la transition énergétique.
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