Détabouiser les règlesVaud révèle les chiffres de la précarité menstruelle
À titre d’expérience pilote, le Canton met à disposition des élèves des protections périodiques dans 51 lieux de formations. Il en tire un bilan éloquent.

Trois-quarts des élèves menstruées se sont déjà retrouvées en manque de protections périodiques à l’école. Et 5% disent avoir des difficultés financières à s’en acheter. C’est ce que révèle l’analyse du Canton de Vaud, basée sur les réponses à un questionnaire auquel ont répondu 13’600 élèves de l’École obligatoire (7e à 11e année) et postobligatoire. Cette étude, présentée comme inédite en Suisse, fait partie d’un projet pilote, «Agir contre la précarité menstruelle», dont l’axe fort est la mise à disposition gratuite de protections périodiques dans certaines écoles.
«On ne met pas en place des politiques publiques pour la beauté du geste, mais pour apporter des réponses et des solutions à des problèmes concrets. Et ce projet en est un symbole», a introduit la ministre de la Formation Cesla Amarelle, au moment d’en faire un premier bilan devant la presse, ce jeudi. Impossible de ne pas y voir une allusion à celles et ceux qui, dans le corps enseignant, lui reprochent d’avoir mené trop de réformes de front. La socialiste n’a pas été réélue ce printemps et quittera ses fonctions à la fin du mois.
Enthousiasme marqué
L’expérience soulève un enthousiasme rare, a-t-elle noté. L’installation de distributeurs a d’abord eu lieu dans sept établissements en 2021 avant d’être étendue à 44 autres au début de 2022. «C’est que la demande pour en faire partie a été très forte, émanant tant des directions, des élèves, des Communes…» Fournis par le Département, ces produits menstruels «sont biologiques et garantis sans éléments toxiques».
L’objectif étant aussi de briser le silence autour des règles, des ateliers, conférences, stands d’information, activités artistiques et travaux de maturité ont aussi été organisés en lien avec cette thématique. Pour la moitié des élèves sondés, un tabou existe toujours autour des menstruations.
«On ne met pas en place des politiques publiques pour la beauté du geste, mais pour apporter des réponses et des solutions à des problèmes concrets.»
D’autres statistiques interpellent les spécialistes: 9% des gymnasiennes et 20% des élèves d’écoles professionnelles ont déjà dû choisir, faute d’argent, entre l’achat de protection ou d’un autre bien de première nécessité. Au postobligatoire, près de 70% des élèves menstruées ont déjà manqué des cours à cause de leurs règles, la plupart en raison des douleurs. Ces douleurs, que trois-quarts des sondées disent ressentir, feront l’objet d’une investigation future afin de «mieux appréhender l’impact des règles sur la vie scolaire», précise le Département.
97% des filles et 85% des garçons jugent nécessaire d’avoir des distributeurs de protections périodiques dans leur école. Si leur installation devait se généraliser, ce serait aux Communes de les financer dans les collèges, et à l’État s’agissant des gymnases et écoles professionnelles. Estimation du coût: «Entre 4000 et 5000 francs pour 1000 élèves, soit à peu près autant que le coût des essuie-mains», précise Véronique Berseth, déléguée à la protection du climat scolaire.
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