[VIDÉO] Le mentaliste manipule les gens pour mieux les divertir
Ado amateur de cirque et de magie, Nicolas Burri est devenu maître dans l'art de faire croire qu'il déchiffre les pensées des autres. Il propose un show bluffant.
Il ouvre la porte de son appartement vêtu d'un pantalon bleu roi, d'une chemise blanche et d'une veste de costard. Et il précise d'emblée, presque gêné, qu'il ne s'habille normalement pas ainsi. «Le photographe m'a demandé de revêtir mon «costume» de scène.» Nicolas Burri n'est pas vraiment du genre à se pavaner en habit de lumière, même s'il apprécie faire son show sous les projecteurs.
L'enfant né à Orbe, élevé à Corcelles-sur-Chavornay, cultive l'humilité à la vaudoise, parlant allègrement tout en se dévoilant peu. Il se méfie peut-être. Lui, le mentaliste qui sait si bien déchiffrer les autres. «Le mentalisme, c'est donner l'impression d'avoir un sixième sens, grâce à une boîte à outils, mélange de techniques liées à la psychologie et au monde de l'illusion.»
En moins de deux minutes, sans poser de questions, il parvient à retrouver le mot que l'on a choisi dans un livre de plus de cent pages, piqué au hasard dans son appartement. Mais l'illusionniste réfute tout don. «C'est comme le piano, tout le monde peut en jouer, mais pas de la même manière.» Son art, Nicolas Burri le maîtrise parfaitement. Bosseur avec un penchant stakhanoviste, il ne cesse de se documenter, de rechercher de nouveaux effets et tours.
Le mentalisme, c'est comme le piano, tout le monde peut en jouer mais pas de la même manière
Depuis toujours, son entourage fait office de cobaye. «Ils sont exigeants car, à force, ils commencent à connaître certaines techniques. Donc si ça passe la rampe, c'est gagné.» Au départ, c'est l'univers circassien qui l'a attiré. «Mon père était géomètre et ma mère infirmière, cela ne vient donc pas d'eux. Mais j'aurais eu un arrière-grand-père magicien à ses heures.» L'ado suit des ateliers du Cirque Helvetia. À 12 ans, il passe des heures à jongler avec des balles, des quilles, des anneaux. Puis le saltimbanque lorgne du côté de la magie et ses parents l'inscrivent à une école à Yverdon. Il rêve du centre de formation aux arts du cirque Fratellini, à la Plaine Saint-Denis. Il suivra finalement le Gymnase d'Yverdon. En parallèle, il se lance sur les traces de Copperfield, potasse les techniques d'illusion, tente d'hypnotiser ses potes. «Je les saoulais de paroles jusqu'à ce qu'ils tombent.»
Il est devenu moins volubile, plus efficient. Au cours de ses spectacles, il semble s'immiscer dans les cerveaux, hypnotise, prédit le futur, utilise parole et regard pour manipuler son public sans en avoir l'air. Alors, forcément, on ne peut s'empêcher d'imaginer notre âme mise à nu devant ce triturateur de pensées. Il rassure, hors scène, ses superpouvoirs s'évanouissent.
Au quotidien, Nicolas Burri revêt sa casquette d'enseignant à l'école primaire d'Éclépens. Par choix et non par besoin financier. «Je pourrais gagner ma vie en tant que mentaliste, mais je préfère garder la liberté de pouvoir choisir les contrats qui me plaisent, sans obligation. Pour ne pas se planter lors de spectacles, il faut être en forme, bien disposé intérieurement et à l'écoute.» À chaque début d'année, pour éviter tout malentendu, il met les choses à plat, dissociant ses deux occupations. «Il m'est arrivé d'avoir des parents d'élèves qui avaient peur que j'hypnotise leurs enfants.»
Cultiver la curiosité
L'enseignant, issu de l'École normale d'Yverdon, n'use pas de magie pour rendre les étudiants plus dociles. Par contre, il puise dans sa mallette de techniques pour les aider à se concentrer et à apprendre. «Au gymnase, j'étais une pive en allemand, jusqu'à ce qu'une enseignante nous montre comment travailler avec la gestion mentale. Cela a été le déclic. J'incite mes élèves à mettre du sens dans ce qu'ils apprennent et à se poser des questions.» L'homme à la mémoire musclée cultive la curiosité comme le décalage de point de vue.
«Il est fascinant, il pourrait prendre la grosse tête, mais il n'est pas du tout gonflé. Il est humble, toujours très respectueux et attentif aux autres», confie Laurent Willenegger. Le peintre et illustrateur naturaliste a fait la connaissance de Nicolas Burri lors d'un remplacement au collège d'Éclépens. Nicolas a d'ailleurs accroché un de ses tableaux dans le salon de son appartement de Corcelles-sur-Chavornay, où il vit avec sa compagne, Géraldine, et leurs deux enfants, Lalie et Malo.
Mais c'est la finesse et la précision de l'art horloger qui transportent réellement le mentaliste à la barbe taillée avec minutie. Il faut dire qu'il aime regarder les minutes s'égrener. «Je m'assieds régulièrement une demi-heure sur le canapé sans rien faire. Pour ma compagne, c'est incompréhensible.» Prendre le temps, écouter, mais aussi observer, des indispensables du mentalisme devenus habitudes. «Lorsque je voyage en train, je ne m'assieds pas n'importe où, je parcours parfois deux fois le couloir et je me fie à mon ressenti.» Le même qui le guide durant ses prestations depuis plus de vingt ans. Le spectacle de la petite fête de paroisse organisée par des amis de la famille s'étant mué en show rodé. Parfois public, souvent privé.
«J'aime les soirées d'entreprises, même si c'est stressant, car les gens ne sont pas là pour moi. Ils ont bossé toute la journée, ils se réjouissent de l'apéro et j'ai seulement quelques minutes pour capter leur attention. Cela ne m'est jamais arrivé que ça tombe à plat, mais c'est l'angoisse permanente.» Caméléon devenu pro du small talk, Nicolas Burri a appris à se fondre dans n'importe quel milieu. «C'est simple, il est à l'aise partout. Vous le mettez dans une pièce, dix minutes après il connaît tout le monde», rigole sa compagne Géraldine, également enseignante.
Ils se sont rencontrés il y a plus de dix ans dans le cadre professionnel. Elle avoue timidement que, dans la famille, c'est elle qui croche le moins au mentalisme. Au contraire de leurs enfants, captivés par les tours de leur père. Malo tentant déjà d'hypnotiser ses copains. Mais, promis, en homme franc et fiable, l'enseignant n'use pas de ses techniques de manipulation envers sa famille. Même pas pour gagner au Cluedo.
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