Le vin nature, qui vit une jolie expansion en Suisse, déchaîne les passions. De ses détracteurs, qui considèrent au mieux que ce n’est pas du vin, à ses apôtres, qui voient au pire le vin conventionnel comme le breuvage à abattre. C’est peut-être parce que les connaissances qu’on a sur ce qui n’est rien d’autre qu’une méthode de vinification sont aussi floues qu’un vin non filtré. Et que, partant, tous les fantasmes sont possibles.
«On nous imagine facilement comme des fumeurs de joints assis sur un tas de foin!» se marre Frank Siffert, président de l’Association Suisse Vin Nature, née dans le canton de Vaud il y a à peine deux ans. L’amalgame entre biodynamie – méthode anthroposophique qui suit le calendrier lunaire – et vin nature est aussi fréquent, propulsant les vignerons au rang d’illuminés tout droit tombés de la lune.
Or, à observer de plus près l’élaboration d’un vin nature, on se rend compte que, même si ce n’est «que du raisin», comme le revendiquent certains slogans qui veulent souligner l’absence totale d’additifs (contre 90 intrants autorisés en conventionnel, 40 en Bio Suisse, 26 en Demeter), c’est aussi une succession de gestes techniques à apprendre et à maîtriser. Ceux qui produisent des vins nature sont davantage des scientifiques que des mystiques qui suivent leurs cuves au tarot.
Le parallèle peut être fait entre l’engouement pour les vins nature et celui pour les bières artisanales: ces tendances répondent à un besoin de se distancier des excès de l’industrie et de retrouver des goûts véritables. Le premier crispe davantage l’opinion, car le vin est identitaire, ancré dans notre histoire, dans notre terroir. Cette terre, justement, les producteurs nature, comme toujours plus de producteurs conventionnels, en prennent soin en conscience. Se fichant éperdument de la lune.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Éditorial – Vin de la lune, vin de la terre
Les idées reçues sur le vin nature sont nombreuses. Il n’est pourtant pas la marotte de quelques illuminés.